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Page Web retravaillée à partir des recherches de Laurence Minnoye
L'homme n'a pas toujours
pensé à la vie de la même manière selon
les époques. Il n'existait pas au Moyen Age de réel sentiment envers l'enfance
et on a l'impression de ne pas rencontrer d'attachement chez les
parents. Sans parler d'indifférence - car il est dangereux
de se prononcer catégoriquement sur ce sujet - les parents
vivaient probablement avec fatalisme une relation qui pouvait
toujours être rompue prématurément(voir
aussi). En effet, une mortalité très élevée
décimait les nouveaux-nés dès les premiers
jours de leur naissance, soit de mauvaise conformation, soit des
suites d'un accouchement difficile. On a vu par
ailleurs que les compétences des sages-femmes ont longtemps
été très réduites.
Une cause fréquente de décès chez les pauvres
était l'étouffement. L'habitude de dormir tous ensemble
sur un grand châlit, le souci de tenir le bébé
au chaud amenaient les parents à garder le petit couché
entre eux et les accidents mortels n'étaient pas rares.
En-dessous de 5 ans, ils mouraient de fièvres, de la variole,
de dysenterie, de sous-alimentation.
Dès que l'enfant commence à se déplacer et
surtout quand un autre bébé est venu prendre sa
place, il est soumis aux multiples danger de la vie rurale: bêtes,
puit, outils etc... Une surveillance attentive n'est souvent pas
possible quand la simple survie occupe les deux parents.
paraît confortable". Pour le propos qui nous occupe, on voit toutefois les multiples dangers qui y guettaient les petits: le feu, la grande marmite pleine de liquide brûlant, le chien qui dort dans le berceau, les grands ciseaux à portée des menottes, l'escalier raide et sans rampe, les outils qui traînent ça et là. Certes les adultes sont nombreux mais chacun a beaucoup à faire : ainsi la maman allaite son dernier-né tout en surveillant la marmite et en jetant un coup d'oeil sur le 2ème qui boit son "biberon" tout seul, tandis que l'aîné parle avec l'épouse du seigneur venu rendre visite à son fermier. |
Pendant plusieurs siècles,
les couples attacheront peu d'importance aux naissances. Les femmes
étaient régulièrement enceintes, ne connaissant
pas les moyens de contraception. Parfois, ils avaient recours
à des pratiques abortives quoique la pratique la plus courante
d'avortement ait été l'infanticide. Cet acte était
mal réprimé par la loi; en effet, vu la fragilité
des nouveaux-nés, il passait souvent inaperçu (voir aussi) Dans les campagnes,
l'infanticide touchait plus particulièrement les filles
car celles-ci n'étaient pas aussi utiles que les garçons
pour travailler dans les champs.
Comme on l'a vu ailleurs,
l'Eglise va encourager l'adoption pour lutter contre l'infanticide.
L'autre moyen de se débarrasser d'un enfant non voulu,
l'avortement, est lui terriblement sanctionné.
Ce mépris de la vie, cette insouciance pour les petits enfants est un fait social bien oublié aujourd'hui. Il est vrai qu'à partir du début des Temps Modernes, un mouvement se dessine pour protéger les jeunes existences et les prendre en considération. On commence à libérer les enfants des bandelettes serrées du maillot primitif, à considérer le nu enfantin comme un modèle d'angélisme. Le nourrisson n'est plus l'objet d'un mépris, un petit animal bruyant que l'on berce avec rudesse pour ne plus l'entendre. D'ailleurs, l'Eglise enseigne désormais avec de plus en plus d'insistance que l'âme est donnée à l'homme dès sa naissance, qu'il faut baptiser très vite le nouveau né et ne plus attendre l'âge de deux ou trois ans comme le voulait la coutume. La peur très présente de l'enfer et l'importance du baptême vont avoir pour conséquences de positiver les décès prématurés. Pour la plupart des parents,en effet, ce n'est pas un scandale de voir une vie brisée si tôt mais au contraire une chance: l'enfant baptisé n'a pas encore eu le temps de pécher; il est donc assuré du paradis et soulagé d'une vie de larmes et de peines.
La nourrice, deuxième
mère de l'enfant ?
Les parents pensèrent
alors que le mieux pour leurs enfants était de les placer
au bon air de la campagne, chez une nourrice. Ces parents sont
souvent issus de la bourgeoisie moyenne ou petite, ce sont ceux
qui n'ont pas les moyens de se procurer une nourrice à
domicile mais qui doivent néanmoins soit avoir une vie
mondaine, soit travailler très durement. Dans ce type de
foyers, on ne peut se permettre de supporter les cris d'un bambin
ou de lui prodiguer des soins, alors on décharge cette
tâche sur une autre personne, la nourrice. Pourtant les
études prouvent que c'est précisément chez
les enfants mis en nourrice que la mortalité est la plus
élevée (30 à 40% de décès!),
si l'on met à part chez les enfants abandonnés.
Les enfants livrés aux nourrices reçoivent rarement
de visites de leurs parents. Si ces enfants meurent, nul ne s'en
préoccupe. Et, si certains enfants fatiguent la nourrice
par leurs cris, elle les échange contre d'autres plus calmes.
La nourrice peut aussi être amenée à s'occuper
d'orphelins, placés chez elle par l'Hôpital des Enfants
Trouvés, service de l'assistance publique chargé
d'accueillir les enfants à l'hospice dépositaire
avant de les placer chez des nourrices (voir
aussi).
Les soins apportés
aux bébés
Les soins que l'on apporte aux nourrissons avant le XIXème
siècle sont pour le moins rudimentaires. On les emmaillote
sur des matelas de paille, on leur met une chemise ou des langes
qui leur collent les bras contre la poitrine. On serre leurs linges
sur les cuisses et les jambes, de sorte qu'ils ne peuvent pas
bouger, on les change le moins possible. S'ils crient, on les
fait taire en les secouant très fort ou en leur donnant
du sirop caramélisé.
Certes, il existe des enfants heureux, tombés par hasard
sur des nourrices honnêtes, saines et propres. Mais la mortalité
infantile reste encore considérable, faute de soins, faute
d'hygiène, faute de conscience affective chez les parents
qui se déchargent littéralement de leurs bébés
en les confiant à une étrangère.
A partir de 1800, l'habitude de placer les enfants
chez les nourrices rétribuées diminua considérablement.
C'est bien souvent pour sauver la vie de leurs enfants que les
mères du XIXème siècle commencent à
les allaiter elles-mêmes. En effet, les enfants placés
à la campagne, n'étaient pas à l'abri d'épidémies.
Ce mouvement de reprise en main des nourrissons fut en France
très long, en 1920 il y avait toujours plus de 50.000 enfants
placés chez des nourrices, soit 7% de tous les nourrissons.
Cette lenteur est sans doute légitime car les mères
redoutaient les mauvais effets d'une alimentation au biberon à
qui on attribuait, faute d'hygiène, les chiffres élevés
de mortalité infantile jusqu'en 1914.
Statistiques citée par le Dr A.Delcourt dans "la Patrie belge - 1830-1930", éditions du Soir, Bruxelles, 1930, p. 286 |
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sein
maternel biberon donné par la mère sein en nourrice biberon en nourrice |
13
pour 100 32 pour 100 50 pour 100 65 pour 100 |
De nos jours
Les conditions dans
lesquelles naissent et vivent les nourrissons de nos jours ont
nettement évolué et continuent à évoluer
pour permettre à l'enfant de se sentir toujours mieux.
En effet, contrairement aux pratiques du Moyen Age, le bien-être
de l'enfant est pris en compte et est très important. Les
parents recherchent ce qu'il y a de mieux pour leurs bébés.
Désormais, la plupart des parents consultent un pédiatre
et se rendent aux consultations des nourrissons pour apprendre
à s'occuper au mieux de leur enfant, cela témoigne
de leur envie d'assurer à leur enfant un bon départ
dans la vie. En 1993 sera créé l'O.N.E. - l'Office
National de l'Enfance - pour préserver bébé
de certaines maladies ou encore pour éviter la mort subite
du nourrisson qui effraye souvent les parents. L'infanticide et
les épidémies ont quasi totalement disparu dans
nos pays, mais il reste toutefois présent dans des campagnes
retirées des pays orientaux. Cet infanticide touche toujours
plus particulièrement les filles, moins efficaces au travail
que les garçons et futures charges financières à
cause de la dot.
L'assistance à l'enfance a aussi beaucoup évolué au cours de son histoire, les orphelins sont pris en charge par des organismes qui tentent de leur trouver une famille d'accueil apte à s'occuper d'eux. On est loin du placement "à l'aveuglette " chez une nourrice, encore une fois, c'est le bien-être de l'enfant qui prime.
Bibliographie
Ouvrage
Santé et mortalité des enfants en Europe, Inégalités
sociales d'hier et d 'aujourd'hui, Chaire Quetelet, éd.
Academia-Bruylant L'Harmattan, 1996
Les oubliés de l'histoire, Pierre Miquel, Livre de poche,
1978. p.20 " La vie de famille " et p.31 " La nourrice
sèche "
Article
Un nouveau-né sur deux... , article de François
Lebrun, revue l'Histoire n°74, p 90-92
Internet
Site des hôpitaux de Paris: www.ap-hop-paris.fr/histoire/1901.htm,
visité le 25 avril 2002
Illustrations
Jan Brueghel l'Ancien, Une
visite à la ferme, dans Pierre
Breughel le Jeune - Jan Breughel l'Ancien, une famille de peintres
flamands, vers 1600,
catalogue de l'exposition du Koninklijk Museum voor Schone Kunsten,
Anvers, juillet 1998, Luca Verlag Lingen, 1998, pp. 84-85
Georges de La Tour, Le nouveau-né, dans Le XVIIe siècle,
collection Histoire générale de la peinture,
tome 12, Editions Rencontre, Lausanne, 1966, p. 63