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Evolution des rapports sociaux dans l'entreprise
le cas de la Belgique aux 19e et 20e siècles

 

Page réalisée à partir du travail de Sébastien Dumont

Introduction

Au 19es, les relations sociales, autant dans les mines que dans l'ensemble des industries, sont minimes et la plupart du temps conflictuelles. Les patrons veulent faire le plus d'argent possible en sous-payant les ouvriers (que l'on appelle prolétaires) pour pouvoir acheter des machines et donc être plus performants. Les patrons ne voulaient pas donner de libertés aux prolétaires de peur que ceux-ci se cultivent et s'émancipent, et en faisant cela, qu'ils se rebellent contre les patrons.
Maintenant tout cela a changé et les relations sociales entre patrons et ouvriers sont plus faciles mais il reste néanmoins parfois des difficultés de dialogues, dialogue qui se passe entre syndicats et patronats.

1. Les mines liégeoises
Dès le 12es commence l'extraction d'une terre noire propre à faire du feu. Elle portera un nom wallon: la houille.
C'est elle qui fait la prospérité de la région liégeoise.
Elles ne cesseront de se développer pendant des centaines d'années. Grâce aux diverses améliorations dues à la révolution industrielle, le travail dans la mine devient moins dangereux mais la nécessité de produire contribue à ré-augmenter des risques que les progrès techniques auraient dû considérablement diminuer. De plus les ouvriers, sans aucun moyen de défense légal ni aucune possibilité de s'associer pour protéger leurs droits, étaient exploités par les patrons.
La grande grève de 1886 fit changer beaucoup de choses tant au plan social qu'au plan matériel. C'est à ce moment que démarra véritablement d'une part la prise de conscience de l'existence d'une question sociale et son entrée sur la scène politique. Dès lors, la législation sur le travail va se mettre en place, la représentation ouvrière se structurer.
Toutes les mines liégeoises fonctionnaient à plein rendement jusque dans les années 60. Peu à peu toutefois plusieurs défauts apparurent, la vétusté des installations et surtout les difficultés d'accessibilité des veines, profondes et coûteuses en investissement. D'autres sources d'énergie devenaient plus rentables, gaz naturel, nucléaire et surtout pétrole. Le charbon cessait d'être compétitif.
En 1975, le Comité Ministériel de Coordination Economique et Sociale décida d'arrêter la subsidiation d'État aux charbonnages wallons.
Les derniers sièges liégeois fermèrent leurs portes les uns après les autre; celui d'Argenteau-Trembleur bénéficia du triste privilège de fermer le dernier, le 31 mars 1980. ( voir aussi d'autres travaux )

2. Les problèmes ouvriers (1850)
Au point de vue de la politique économique de l'Etat, la question ouvrière se présentait sous un double aspect. D'un côté, il y avait le problème de la législation ancienne contenant des éléments d'une véritable discrimination vis-à-vis des ouvriers. D'autre part, en présence de certaines situations déplorables, la question s se posait de savoir s'il ne convenait pas de prendre des mesures protectrices du travail. C'est pourquoi les ouvriers du bassin liégeois se se rassemblèrent au début par usine et ensuite par groupement d'usines en groupes de pression et de dialogue entre patron et travailleurs. C'était le début des syndicats.

3. Historique des évolutions sociales en Belgique et la naissance des syndicats
Avant 1800 existaient seulement le travail artisanal, les corporations et les guildes, càd des organisations structurées par métier et non par positions sociales, patrons et travailleurs s'y retrouvant ensemble. Seules les associations de compagnons pouvaient passer pour une ébauche de défense professionnelle du travailleur contre le patron.
L'invention de la machine à vapeur (première introduction en Belgique en 1785) permet le recours à d'autres méthodes de production. La mécanisation fait ainsi son apparition, les entreprises comptent d'abord moins de travailleurs mais ils sont soumis à des conditions de travail et de vie inhumaines.
En 1789 éclatent la révolution brabançonne ainsi que la révolution liégeoise. Les associations de compagnons prônent des augmentations salariales, la réduction du temps de travail et le paiement des heures supplémentaires mais elles sont isolées.
La loi "Le Chapelier" en 1791, qui veut libérer l'économie de toute entrave, et l'affranchir des multiples réglementations sclérosées de l'Ancien Régime, interdit toute réunion de gens de métier, patrons comme ouvriers, ainsi que toute association et coalition. Très rapidement toutefois des associations qui souhaitent se protéger des patrons sont fondées. Elles constituent le prolongement des anciennes associations de compagnons avec toutefois une sensibilité sociale et une solidarité beaucoup plus poussées.
Voyons brièvement quelques-unes des avancées obtenues par les luttes sociales:
1813
: l'âge minimum pour le travail des enfants dans les mines est ramené à 10 ans;
1841: création du syndicat des mineurs du Centre (Hainaut);
1859: crise économique;
Premier syndicat d'ouvriers de fabrique des tisserands et fileurs de Gand;
Association de quelques mutualités du milieu artisanal et tentative de créations d'associations professionnelles à Bruxelles. Apparition des syndicats de métallurgistes;
1860: Rassemblement des syndicats de métallurgistes au sein de l'Union des Travailleurs;
1885: fondation du Parti Ouvrier Belge (POB)
1886: importantes émeutes à Liège et dans le Hainaut, grève générale et emprisonnement de meneurs.
Alfred Defuisseaux publie son "catéchisme du peuple" en 260.000 exemplaires afin d'exhorter les travailleurs à s'organiser pour obtenir le suffrage universel; en Flandre sont créées une série d'associations professionnelles chrétiennes, en réaction avec le monde socialiste.
Les syndicats deviennent légaux mais aucune pression ni aucune violence ne peut être exercée pour empêcher le travail.
1888: Loi portant sue la création de l'inspection du travail;
1889: Limitation du travail des femmes et des enfants;
1890: célébration de la fête du Travail. En Belgique, ce jour ne deviendra férié qu'en 1947, ce qui signifie donc que le fêter auparavant signifiait perdre sa journée de salaire;
1893
: grève générale pour l'obtention du suffrage universel. Le gouvernement accorde le vote plural: tous les hommes votent et certaines conditions donnent 2, voire 3 voix.
1898: loi sur les associations professionnelles stipulant à quelles conditions les syndicats peuvent obtenir une personnalité juridique. Cette loi oblige le POB et d'autres syndicats déjà existant à démanteler leurs structures;
1900: premières élections aau vote plural selon le système de la représentation proportionnelle;
1905: le repos dominical est instauré;
1909: la durée du travail dans les mines est ramenée à 9h par jour;
Les 16 fédérations flamandes constituent l'Union des Associations professionnelles chrétiennes; quelques mois plus tard, la Confédération générale des syndicats chrétiens et libres des provinces wallonnes est créée.
1912: fusion des ailes wallonnes et flamandes dans une seule Confédération des syndicats chrétiens, la CSC.
1914: loi sur l'enseignement obligatoire de 6 à 14 ans, toutefois la guerre ne rendra son application réelle qu'à partir de 1919;
1918: loi sur la journée des 8 heures légale ainsi que sur la liberté syndicale. Création de la société nationale des habitations à bon marché;
1919: le suffrage universel masculin, un homme, une vote, entre en vigueur;
1921: instauration de la journée de travail limitée à 8 heures;
La liberté d'association est autorisée par la loi, la reconnaissance des syndicats est un fait. le mouvement syndical passe de 129.000 affiliés en 1914 à 690.000 en 1921;
1924: la pension de vieillesse est reconnue;
1925: création dans chaque commune d'une Commission d'Assistance Publique (qui deviendra le CPAS en 1976)
1930: création du fonds des allocations familiales; il s'agit d'encourager la natalité et d'augmenter les revenus des travailleurs sans toucher aux salaires.
1935: la grande crise a touché le continent européen, le regard sur le chômage change, il apparaît comme une menace potentielle pour presque tout le monde. L'Office national de Placement et de chômage est mis en place. La scolarité obligatoire passe à 16 ans.
1936: après une grève générale qui mobilise un million et demi de travailleurs, le gouvernement vote les premiers congés payés d'une semaine. Dans les mine,s on décrète la semaine de 40 heures.
1942: les instituteurs, les postiers et les fonctionnaires fondent dans la clandestinité le syndicat général unifié des services publics (SGUSP)
1944: suite à des négociations menées pendant la guerre entre syndicats et patrons, en décembre est créée officiellement notre Sécurité Sociale avec le fonctionnement que nous lui connaissons actuellement, càd fondé sur la contribution des 3 piliers Etat/travailleur/patron;
1945: création , en avril, de la fédération Générale des Travailleurs de Belgique (FGTB) qui succède à la CGTB
1948: les femmes obtiennent le droit de vote aux législatives;


 

1960: durant l'hiver 60/61, le vote de "la Loi unique" provoque les "grandes grèves" qui paralyseront la Wallonie surtout pendant presqu'un mois.

Ci-contre : la Une du journal "La Cité" du vendredi 30 décembre 1960, montrant un manifestant à Bruxelles qui jette des pavés sur les forces de l'ordre. A l'arrière une pancarte affirme la solidarité des travailleurs chrétiens. En fait, la CSC et les centrales chrétiennes de manière générale restèrent toujours en retrait. En Flandre, l'opposition nettement affirmée de l'Eglise et l'ordre donné par le Cardinal de ne pas s'engager dans le conflit eurent des effets très dissuasifs.. Même en Wallonie, le ton fédéraliste imprimé par André Renard à la grève en a écarté plus d'un. (collect.personnelle)

Dans les années 70, la Belgique subit les chocs pétroliers; l'inflation explose et les chiffres du chômage, qui signalaient jusque-là une frange de travailleurs sous-qualifiés ou d'individus marginaux, dénoncent alors que toutes les couches et tous les métiers sont touchés. D'environ 50.000 on va monter jusqu'à près d'un demi million. La façon de travailler des syndicats va changer, celle des patrons aussi. la catastrophe est tellement importante qu'il faut envisager autrement les relations sociales. L'Etat va se poser en arbitre des tensions et soutenir financièrement les solutions. Cela n'empêche pas que de très nombreuses mesures vont être prises qui mettront un arrêt au progrès social.
1983: grève générale des services publics contre les mesures d'austérité prévues par le gouvernement "Martens-Gol"; les différents gouvernements menés par le 1er ministre CVP mettent en place des processus de démantèlements des acquis de la Sécurité sociale qu'ils justifient comme seul moyen d'atténuer la dette publique. Le chômage reste pourtant assez élevé et le pouvoir d'achat ne cesse de diminuer. Les entreprises continuent de mettre la clé sous le paillasson et la dette ne diminue que très faiblement.
1986: en mai, grève des travailleurs des services publics contre les mesures d'assainissement prises par le gouvernement dans le cadre des pouvoirs spéciaux (donc sans vote du Parlement);
1988: le changement de gouvernement et de cap fait surgir des espoirs marqués notamment par une brève reprise et une légère diminution du chômage.
Mais les années 90 seront marquées par de nombreuses fermetures et par une politique très contraignante de restrictions budgétaires pour réduire le déficit chronique de l'Etat.
Les nouvelles technologies, la modification de comportement du capital, l'unification européenne introduisent une période visant seulement le maintien des acquis. Les combats syndicats ne peuvent plus beaucoup se mener pour des améliorations des conditions de travail mais plutôt pour obtenir des mesures d'adoucissement de licenciement collectif. La pré-pension se répand. Alors qu'au paravant l'ouvrier était exploité par le patron, il est maintenant exclu par le Capital de manière sélective.
Cette chronologie démontre que l'évolution des relations sociales fut d'abord une suite de combats, longs, difficiles et de victoires obtenues seulement par des pressions constantes exercées par les syndicats pour organiser mutuelles, pensions, meilleures conditions de travail, augmentation de salaires, avantages divers ... Plus tard, le "modèle belge " du consensus permet, notamment grâce à l'intervention de l'Etat comme partenaire, de travailler plus dans la concertation que dans l'affrontement.

4. les différents syndicats et les différentes mutuelles belges
La Belgique a la particularité d'avoir été, pendant de très longues années, fondée sur le système des piliers, càd un ensemble d'organisations sociales, culturelles, associatives alliées des trois grandes familles politiques, socialiste, libérale et chrétienne. Depuis l'apparition des partis linguistiques d'abord, puis du parti Ecolo, ce système est devenu insuffisant pour décrire la situation belge mais les anciennes structures sont toujours visibles.

 Syndicats  mutuelles
 CGSP de tendance socialiste  mutualités socialistes
 CSC de tendance chrétienne  mutualités chrétiennes
 CGSLB de tendance libérale  mutualités neutres

Conclusion
Les relations entre patrons et ouvriers se sont développées au cours des années. Elles ont souvent été marquées par des luttes sévères, surtout au tournant des 19e et 20es siècle, lorsque les forces politiques étaient encore essentiellement bourgeoises. L'accès au suffrage universel va ouvrir le monde ouvrier au pouvoir politique par le biais des partis de gauche et donc changer le mode de luttes.
De rares et conflictuelles au départ, les relations sont devenues de plus en plus souvent des négociations entre trois partenaires, les syndicats, les représentants patronaux et l'Etat belge. Aujourd'hui, dans un contexte de crise qui se prolonge, il s'agit bien souvent de gérer ensemble les licenciements plus que de distribuer les bienfaits de la croissance. Tout cela dans un contexte de mondialisation de l'économie où les puissances économiques transcendent les frontières mais où les travailleurs n'ont pas encore réalisé pareille unité.

Bibliographie
B.S.Chelpner, cent ans d'histoire sociale en Belgique, ULB, 1956
CRISP, dossier n°18: Le système de la décision politique en Belgique, 1983.
X.Mabille, dossier: les relations du travail: le rôle des associations de travailleurs et syndicats, 23/02/02
R.Proveur, Panorama d'Histoire sociale de 1830 à 1960, UCL, 1982
Th. Jamin, cours d'histoire sociale et politique, syllabus, Liège, 1998
http://www.wallonie-en-ligne.net/wallonie-histoire/hist-econom-sociale/chap8-1.htm
http://www.blegnymine.be
http://www.cgsp.be

illustrations
Schéma d'une houillère liégeoise, publié par Louvrex en 1750 dans J.Lejeune, La principauté de Liège, édit. le grand Liège, 1966.
Eugène Laermans, Soir de grève, 1893, conservé au Musée d'Art Moderne, Bruxelles, reproduit dans La Belgique, une terre, des hommes, une histoire, sous la direction de Guido Peeeters, édition Elsevier, 1980, p.219

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