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Le droit au travail des femmes: servitude ou liberté ?

Transposition pour le Web du travail de Sarah Vivegnis

Condition de l'ouvrière au 19ème siècle

Pourquoi qualifier le 19ème siècle de " siècle de l'ouvrière " ? C'est qu'un phénomène tout-à- fait nouveau apparaît ; le coton et, avec le coton, ce textile révolutionnaire, la fabrique mue à la vapeur, la manufacture concentrée, si différente de l'ancienne fabrique lyonnaise éclatée en mille ateliers familiaux. Des usines, des fabriques, pas forcément énormes : cinquante à cent ouvriers et ouvrières, c' est déjà quelque chose. Mais elle se multiplient et il faut bien les peupler. Les patrons puisent dans l'énorme réservoir rural et d' abord chez les femmes, véritables mains de cette première révolution industrielle.

De Villermé au docteur Guépard ,les enquêteurs sociaux du 19ème siècle ont maintes fois retracé les épouvantables conditions de vie des femmes et Caroline Milhaud dans le petit livre L' ouvrière en France, qu' elle a publié en 1906 en a montré la persistance ainsi que la faible efficacité d' une législation tardive : journées de travail interminables que ne peut couper ou aménager aucune décision personnelle ; longueur des trajets, salaire de famine. Le texte de Villermé est célèbre où, il évoque cette " multitude de femmes pâles, maigres, marchant pieds nus au milieu de la boue et qui, faute de parapluie, portent renversé sur la tête lorsqu'il pleut, leur tablier ou leur jupon de dessus, pour se préserver la figure et le cou ".

Est-ce qu'ouvrières et ouvriers subiraient les mêmes coups et souffriraient sur un pied d'égalité, Il n' en est rien.
Le statut des femmes à l' usine est non seulement différent mais discriminé, et nous parvenons même à en entrevoir certaines raisons.
Ouvrière, la femme, à la différence de l' homme, l'est rarement toute sa vie. Le travail féminin à la manufacture est souvent intermittent. Rythmé par les enfants, il se décompose en périodes dont la femme, le plus souvent, n'a pas souhaité le découpage. Un travail fragmentaire, éclaté, qui témoigne que l'ouvrière n'est pas qu'ouvrière mais aussi femme et mère. Assurément les inégalités sont grandes, d'une branche professionnelle à une autre, et il faut les mettre en liaison avec la diversité des conditions de travail.
Dans le tabac et les allumettes, où le chômage est rare et les salaires relativement élevés, le travail est continu : maintes vieilles ouvrières sont entrées petites filles à la manufacture et, même en cas de famille nombreuse, n'ont pas voulu quitter ce milieu privilégié, où l'on s' efforce de faire embaucher ses proches parentes et où la retraite attend celles qui ont su et pu persévérer. Dans certaines branches textiles aussi – la filature surtout – on est frappé par la relative constance du travail. C'est que les salaires, non seulement des femmes mais des hommes, restent si bas que si la jeune mère, chargée d'enfants, cessait de fréquenter l'usine, la famille entière, en tout cas ses membres les plus fragiles, mourrait de faim. Un travail intermittent donc. Mais aussi, quand travail il y a, une activité sous- payée.

Mais, de façon curieuse à nos yeux, ces notations désespérées leur semblent relever de la normalité, de la fatalité. Le sort de l'ouvrière, cette victime principielle, avec l'enfant, de la triomphale industrialisation capitaliste, peut émouvoir, il ne choque pas : c'est ainsi.

 

Curieuse hiérarchie sociale des femmes dans cette image du XIXes (I.P.N. Snark) :
au sommet, la marchande "des femmes avec habileté, j'augmente la parure et la beauté" ;
ensuite, à égalité, la servante "je couds, blanchis et sers à table, aussi je suis indispensable" et la maîtresse d'école "aux filles pendant leur jeunesse, j'enseigne vertu et sagesse";
plus bas, l'ouvrière "à tous les travaux je m'applique, dans l'usine ou la fabrique" et la sage-femme "je sais soigner avec expérience au moment de votre naissance "
et enfin, tout en bas, la paysanne" Croyez en Dieu qui, par ma main, à tous donnera du pain" et la soeur de charité "misères et douleurs, je soulage; Dieu me soutient et m'encourage".
Une pyramide tout-à-l'opposé de celle des besoins de Maslow !

Droits acquis au cours du 19ème et 20ème siècles en Belgique, en rapport avec le travail des femmes

1889 :Les filles de 12 à 21 ans ne peuvent être employées que 12 heures maximum par jour, jamais de nuit et seulement six jours semaine. Interdiction d'occuper les femmes de moins de 21 ans dans les mines. Interdiction d'occuper les femmes pendant 4 semaines suivant leur accouchement

1900 : La loi du 10 mars autorise la femme à conclure un contrat de travail et à percevoir son salaire jusqu' à 3000F par an au maximum.

1911 : Interdiction du travail de nuit pour les employées de l'industrie.

1921 : Première égalité officielle de rémunération, celle-ci se réalise au niveau des échelles barémiques de l'enseignement

1957 : La Belgique ratifie l' article n°119 du Traité de Rome sur l'égalité des salaires entre hommes et femmes, mais tardera à l'appliquer dans les faits. Cette loi restera contournée ( aujourd'hui encore, l' écart moyen entre les rémunérations des hommes et des femmes reste de 23%).

1967 : Arrêté royal octroyant la possibilité à la travailleuse d'aller en justice pour exiger l' égalité des rémunérations.(elle sera inscrite dans une loi de 1971).

1969 : Une loi interdit les clauses, dans certains contrats de travail, exigeant la démission de la femme en cas de mariage ou de maternité.

1975 : La Belgique reconnaît dans une loi l'égalité de rémunération entre travailleurs masculins et féminins, 18 ans après la signature du Traité de Rome.
La commission du travail des Femmes(créée en 1974) est installée auprès du Ministère de l'Emploi et du Travail.
Création des centres d'Observation et d'Orientation de l'ONEM en vue d'un décloisonnement des travaux traditionnellement réservés aux femmes.

1985 : Instauration de la " pause-carrière "

1992 : Les allocations des travailleurs en pause carrière sont diminuées. 90% de ces " bénéficiaires " sont des femmes.

1996 : Modification progressive du calcul des pensions des femmes. En 2009, l'" égalité " avec les hommes sera réalisée.
32.044 cohabitants sont exclus du chômage.89% d' entre eux sont des femmes.

1997 : les revenus des femmes sont en moyenne inférieurs d'1/3 à ceux des hommes.
60% des minimexés sont des femmes seules avec enfants.
Loi supprimant les dispositions de 1971 sur le travail de nuit des femmes.

Le droit au travail ; une servitude ou une liberté ?

Pour moi, c'est une liberté dans le sens où cela permet à la femme de choisir ce qu'elle veut être, à savoir célibataire ou mariée, de ne pas dépendre d'un mari où dans l' hypothèse où elle aurait envie de divorcer pour quelque raison que ce soit, la femme ne se sentira pas obligé de rester auprès de son mari pour pouvoir subvenir à ces besoins et à ceux de ces enfants. Elle ne continuera pas à vivre avec lui par peur d'être à la rue ou de ne pas savoir s'occuper de ses enfants. Elle a acquis toute une série de droit qui la rendent plus indépendante, plus apte à faire des choix

Mais, c'est aussi une servitude, car la femme a toujours été obligée de mener une double vie de travail, à savoir sa journée à l'usine par exemple et sa journée quand elle rentre chez elle(enfant, cuisine, ménage). .De plus, on accorde plus vite aux femmes un travail à temps partiel, ce qui fait que les " maris " se reposent beaucoup sur leur femmes pour l'entretien de la maison mais il faut savoir que parfois les femmes effectuent un travail à temps partiel qui équivaut à un travail à temps plein. Et ce temps partiel est un piège pour l'avenir puisqu'il diminue considérablement leur pension.
D'autre part, à formation égale, elle n'a pas le même type de fonctions- par exemple les responsabilités dans les milieux d'affaires - et donc les mêmes revenus ou les mêmes satisfactions professionnelles qu'un homme.

On voit toutefois une évolution intéressante. Par exemple, avec la féminisation de la profession de médecin généraliste se multiplient aussi des nouveaux fonctionnements : temps partiels choisis, partage de cabinet et de clientèle, travail en maison médicale, qui redonnent à la femme médecin un équilibre entre métier et vie personnelle.

La femme a acquis beaucoup de droits mais c'est une lutte à toujours poursuivre : comme on l'a vu par ailleurs, les partis d'extrême-droite ont parmi leurs buts le retour des femmes au foyer et donc leur exclusion du monde du travail.
ar ailleurs, même si l'égalité des salaires existe en théorie, en pratique, elle est encore fort peu appliquée, en dehors de la Fonction Publique.
Enfin, des activités d'aide dans les milieux indépendants notamment ne sont pas toujours reconnus et donc ne donnent pas de droits personnels à la Sécurité Sociale.
Il y a encore du chemin à faire !

Bibliographie

Livre
Jean-Paul Aron, Misérable et glorieuse, la femme du 19ème siècle, Edition Complexe,1980
Florence Loriaux, Enfants-machines, Histoire du travail des enfants en Belgique aux XIXe et XXes, Carhop, EVO, BX, 2000 : le triage du charbon dans la région liégeoise, photo de Gustave Marissiaux, 1904, collection Musée de la Vie Wallonne à Liège
Dossier pédagogique : N. Styns, janvier 1998,éd. Responsable M-J Laloy, Bruxelles
Chronologie des luttes féministes, F.Claude, B.Gaspard, A.Gutmacher, C. Léonet, I.Simonis

Article
Marie-Cécile Royen, Femmes : Pourquoi le retour au foyer, Le Vif/L'Express,5/4/96,p.44

Internet
Image.opac.60.free.fr/photos/femmes%20ménage01.jpg
Image www.chess.fr/editions/ouvrages97/coll97/coll978.ghif
ambafrance-cm.org/afvp/siteweb/urbain/pdrmm/pdrmm.html: femme creusant un puit en Afrique.


 

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