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Rituels de la mort au travers des différentes civilisations

Transposition pour le Web du travail de Catherine Moury


Introduction
" Qu'est-ce que cent ans, qu'est-ce que mille ans, puisqu'un seul moment les efface ? Multipliez vos jours comme les cerfs, que la Fable ou l'Histoire de la nature fait vivre durant tant de siècle ; durez autant que ces grands chênes sous lesquels nos ancêtres se sont reposés et qui donneront encore de l'ombre à notre prospérité ; entassez dans cet espace, qui paraît immense, honneurs, richesses, plaisirs : que vous profitera cet amas, puisque le dernier souffle de la mort, tout faible, tout languissant, abattra tout d'un coup cette vaine pompe avec la même facilité qu'un château de cartes, vain amusement des enfants "
Bossuet, oeuvres complètes, Sermon sur la mort.


Les rituels funéraires datent de la nuit des temps. Aucune civilisation, de la plus fruste à la plus civilisée, n'a pu échapper à l'angoisse générée de la mort. Etablir un rite, c'est donner un cadre, des balises, un rythme qui peut soutenir et canaliser la peur, la rendre plus compréhensible aussi.

Petit panorama de quelques rituels religieux

a) Les Egyptiens
Les Egyptiens étaient terrorisés par l'oubli, dans lequel ils voyaient le signe d'une fin totale. Toute leur organisation sociale était donc conçue pour assurer la perpétuation du souvenir, garant de l'éternité.
Chaque vivant se devait de préparer son enterrement en achetant d'abord un tombeau, le plus beau, ainsi que l'ameublement : des tables, des chaises, des ustensiles de cuisine, des statues et des amulettes, pour protéger la tombe des démons malfaisants. Il était également impératif d'amasser un pécule pour s'offrir une momification plus ou moins sophistiquée, condition d'accès des morts.
La momification était l'oeuvre de spécialistes, installés dans les Maisons des Morts. Elle se déroulait en plusieurs étapes s'étalant sur septante jours. Une fois ce délai écoulé, le ka du défunt, càd sa force vitale, était libéré pour se transformer en akh éternel. Les funérailles, conçues comme une célébration de la renaissance, pouvaient donc commencer. Extrêmement codifiées, elles se déroulaient en présence de pleurs et de prêtres chargés de lire le Livre des Morts, pour permettre aux proches de suivre les péripéties du voyage du défunt dans l'au-delà. Par précaution, un exemplaire de ce livre était déposé dans la tombe, en même temps que les offrandes alimentaires. L'âme égarée pouvait ainsi le consulter pour retrouver son chemin.

La légende d'Osiris
A l'entrée du royaume, Osiris préside la pesée de l'âme en compagnie de Thoth, le coeur est placé d'un côté d'une balance tandis qu'une plume (symbole de Maât la justice) est déposée de l'autre côté, si le coeur était plus léger que la plume il accédait alors aux Royaume d'Osiris, dans le cas contraire son âme était jetée dans la gueule d'Ammit (la dévoreuse d'âme). Dans le cadre de la solidarité, voir aussi
Thoth se serait créé lui-même au début des temps, de même son épouse Ma'at. Les deux produiront huit enfants dont le plus important, Amon, celui qui est caché était surtout vénéré à Thèbes comme maître de l'univers.
Protecteur des arts et des sciences, il créa le langage, les hiéroglyphes et écrivit entre autres le Livre des Morts. Il est considéré comme étant le coeur et la bouche du grand dieu-soleil, Amon-Ra. Après jugement des paroles des morts, Thoth donnait au dieux son verdict final et décidait alors si l'âme devait être bénie ou maudite.
Thoth est l'inventeur de l'écriture et du langage, le gardien de l'ordre divin, de tous les rituels et du savoir secret. C'est Thoth qui, devant Osiris, inscrit le résultat de la pesée de l'âme du défunt.

b) Les enfants d'Abraham
Depuis le concile Vatican II, les catholiques enterrent leurs morts dans la simplicité. Dans le nouveau rituel des funérailles, la pompe et les ors cèdent la place à des minutes de silence. Des bougies sont allumées, tout comme pour le baptême, symbole de la Résurrection.
Le corps, lui, peut aussi bien être enterré qu'incinéré : l'essentiel, désormais, se situe au niveau du devenir de l'âme séparée du corpspour le repos de laquelle de nombreuses prières sont exigées.
Contrairement aux catholiques, les Juifs comme les Musulmans sont contre l'incinération, par respect pour l'intégrité de la personne humaine. Le mort est enveloppé dans un linceul de lin ou de coton et doit être déposé dans le sol, en osmose avec la terre. Les rites funéraires du judaïsme sont codifiés par la halakha, la loi rabbinique, qui détaille la toilette du mort, accomplie en récitant des versets de la Bible, la manière de lui déchirer les vêtements, le déroulement de la veillée mortuaire avec les lectures du psautier et de la Mishna, et l'inhumation elle-même au cours de laquelle le fils aîné du défunt se doit de lire le Kaddish, la prière libératrice, sans laquelle il n'est point de salut. Le Kaddish sera ensuite récité trois fois par jour, durant onze mois, à la synagogue.
L'enterrement musulman, lui, est expéditif : le corps doit être enseveli le plus rapidement possible; il est soigneusement lavé, enroulé dans un linceul blanc, ensuite il est mis en terre, la tête tournée en direction de la Mecque. Il doit normalement se trouver dans un endroit où il ne cotoyera que des croyants comme lui. Aujourd'hui dans certains cimetières de Belgique, on a créé des enclaves réservées aux musulmans pour leur éviter l'obligatoire et coûteux rapatriement post-mortem.

c) Les Tibétains
Tout Tibétain qui meurt est forcément un moine : s'il n'a pas été ordonné de son vivant, il le sera à sa mort, quand sont cités devant sa dépouille les noms des bouddhas et des divinités. Les mérites de cette récitation sont transférés à son âme, qui en aura grand besoin durant le périple de quarante neuf jours qu'elle entreprend alors, avec l'aide des vivants.
La première règle d'or des Tibétains consiste à ne pas toucher un mort dans les trois jours qui suivent le décès, afin de ne pas entraîner sa conscience vers une renaissance inférieure. Passé ce délai, des mantras sont brûlés sur son cur, puis le corps peut être incinéré, enterré, donné en pâture aux vautours ou aux poisson. C'est à partir de ce moment là que le mort comprend qu'il est mort, et il va alors chercher à se manifester à travers " des phénomènes effrayants ".
Pour l'aider à se détacher de son passé, ses proches sont tenus de mettre un bémol à leur chagrin et de lire quotidiennement le Livres des Morts qui explique au défunt ce qu'il lui arrive. Il leur est également recommandé de prier les Trois Joyaux, de réciter des mantras, de faire des offrandes, aux pauvres ou aux monastères, et de racheter des animaux qui sont ensuite libérés. Enfin, durant cette période, à l'heure du repas, les Tibétains déposent l'offrande du sour sur le pas de leur porte : ils déposent dans une soucoupe quelques pincées de farine et de nourriture brûlée. Le corps mental du défunt se nourrira de l'odeur de ces aliments et engrangera des forces pour son périple dans le bardo.

La société industrielle d'aujourd'hui
Il est aujourd'hui admis que notre XXe siècle vit à l'heure du " tabou " sur la mort, qui aurait remplacé l'ancien tabou sur le sexe, pour définir une nouvelle catégorie d'obscène, de ce dont on ne parle pas.
S'il dissimule la mort réelle, notre siècle a aussi voulu exorciser l'image de la mort. La photographie, le cinéma, s'en sont emparés comme un thème ludique. Et voici qu'elle resurgit, sous des traits les plus traditionnels du crâne grimaçant, au détour d'une vieille rue solitaire, dans bon nombre de films à grand succès. Elle est aussi, hélas, omniprésente dans nos J.T. et si nous ne voyons plus guère nos proches ou nos voisins à l'heure de la mort, nous avons par contre contemplé sur nos écrans des centaines de morts, résultats de conflits, de famines, de catastrophes naturelles., images banales, presqu'irréelles celles-là.
De plus, il semble bien que nos sociétés libérales ont décidé de se débarrasser de cet objet encombrant, la mort. On cryogénise en attendant une résurrection; on embaume et maquille pour effacer les marques de la mort et faire croire à une vie continuée, et surtout, chacun, même s'il est effondré devant la perte d'un être cher, est prié d'épargner à ses connaissances le spectacle de sa tristesse. Plus de vêtements noirs, plus d'excuse pour s'absenter de réjouissances. Il faut rester jeune et gai !

 

Bibliographie
1. Michel Vovelle, L'heure du grand passage, Edition Découvertes Gallimard, 1993.
2. Louis-Vincent Thomas, Les sociétés devant la mort
3. Djénane Kareth Tager, L'actualité religieuse : voyage à travers les rites, 15 novembre 1996.
4. http://www.ladanse.net/histoire/histp3.htlm
5. http://www.mrugala.free.fr/Religions/Egyptes :Dieux

Cadre fait avec les cheveux d'une jeune fille morte et exposé dans sa famille,
photo provenant de " La Belgique Rétro, 1890-1914"
éditions Reader's Digest, Bruxelles, 1988, p.199

 

 

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