Accueil

Personnages

Monuments

Evènements

Dossiers

Documents

Eux aussi

qui suis-je ?

contactez-moi

 

La médecine en milieu rural
au 19e siècle en France
et en Belgique dans le home Sainte Elisabeth à Waimes

Transposition pour le Web du travail d'Aurore Melotte

1. Introduction

La médecine, comme toutes les disciplines scientifiques, a évolué à travers les siècles. Elle a maintenant atteint un niveau assez perfectionné. Mais comment cela se passait-il il y a un peu plus de 100 ans?
Les médecins de campagnes étaient connus de tous les habitants du village dans lequel ils pratiquaient. Quand ils s'installaient et qu'ils n'étaient pas de la région, le plus difficile pour eux était de se faire accepter. Pour ce faire, ils essayaient de respecter les coutumes du village et d'y participer, de parler le dialecte des habitants et d'être proches des gens.
Dans les campagnes, ils étaient confrontés à un autre problème. Les paysans rejetaient les médecins et refusaient parfois de les appeler. Ils étaient encore ancrés dans une société très religieuse et un peu "magique". Ils préfèraient souvent recourir au sorcier du coin avant le médecin. De plus un médecin devait être payé et espérait l'être en pièces d'argent, même s'il devait souvent se contenter d'un poulet, de fruits ou d'oeufs...

2. La médecine en milieu rural au 19ème siècle en France

La deuxième partie du 19ème siècle est une période de grands progrès pour la médecine avec la découverte de sérums, de vaccins, de la chirurgie et de l'obstétrique, grâce à l'anesthésie et à l'asepsie.
Bien sûr, toutes ces découvertes sont minimes à côté des antibiotiques qui n'arriveront qu'un siècle plus tard.
Mais ces progrès ne parviendront que tradivement dans les campagnes et seront appliqués de manière variable, suivant la formation et l'ouverture scientifique du praticien.

Il est important de marquer la différence entre l'officier de santé et le docteur.
Le docteur exerce dans les villes et a une formation poussée(cinq examens plus une thèse), alors que l'officier de santé a une formation moins poussée(trois examens) et exerce essentiellement dans les campagnes.
L'officier de santé doit en principe recourir au docteur dans les cas graves mais cela n'est pas toujours possible. En effet, les distances sont parfois longues entre le village et la ville la plus proche.

Le médecin de campagne exerce, la plupart du temps, jusqu'à sa mort(sauf circonstances particulières comme la maladie).
Il existe des dynasties médicales, des lignées de médecin et même des réseaux familiaux avec les gendres et les neveux. En effet, l'origine des vocations vient parfois des ascendants.
Dans ce cas, l'apprentissage pratique peut se faire par un père, un grand-père, un oncle ou un futur beau-père.

 

 Dans ce tableau de S.L.Filde, intitulé "le médecin", on retrouve la plupart des éléments évoqués : la modestie du milieu où le petit malade dort dans un lit improvisé sur deux chaises, la surveillance dubitative du père debout à l'arrière-plan, le regard soucieux du praticien qui doit se contenter de veiller et d'attendre (Tate Gallery, Londres, dans les grandes tragédies, coll. "Mémoires de l'Humanité", Larousse, 1994, p. 210)

Le métier est ingrat mais les médecins abandonnant leur profession sont rares. Pourtant, la maladie gagne souvent. Il s'agit d'une lutte inégale où le médecin se sait vaincu d'avance. Certains s'étonnent d'ailleurs de la persistance des vocations. Il y a une soumission à un destin que le médecin trouve insensé de prétendre maîtriser.
Pour échapper à tout cela, certains s'adonnent parfois à la boisson.
De plus, ils sont appelés à toute heure de la nuit et du jour. Les campagnes ne sont pas très sûres à cette époque. Et donc, en essayant de sauver des vies, ils risquent la leur.

L'exercice de la médecine n'apporte aucune aisance, aucune situation matérielle extraordinaire.
Que l'on en juge par ces quelques données sur l'aspect financier de la relation entre le médecin et le paysan:
Un ouvrier gagne environ 1 franc par jours et un fonctionnaire 4 francs.
Pour payer l'officier de santé, il faut 0,40 franc et pour payer le docteur, il faut 2 à 5 francs. A cela s'ajoutent les frais de déplacement(1 à 1,5 franc par lieue).
Mais ce n'est pas encore tout, il y a les médicaments qu'il faut payer. Bref, une personne malade dans la famille conduit vite à un désastre.
Ce n'est qu'à partir de 1893 que l'assistance médicale deviendra gratuite à certaines conditions. En 1898, l'accident de travail sera aussi pris en compte et les frais occasionnés par celui-ci seront remboursés. Au départ, cette règle exclut les travailleurs agricoles et engendre donc des inégalités.

Les principaux clients des médecins de campagnes devraient normalement être les paysans.
Mais ceux-ci sont laborieux, ils travaillent jour et nuit, n'ont pas de repos dominical ni de vacances.
Ils continuent même s'ils sont malades, surtout durant les périodes de moisson, car la nature n'attend et ils ont une grande résistance à la douleur.
Pourtant, l'alcool journalier, le manque d'hygiène (par exemple le fumier près des portes) et la proximité des gens et des animaux entraînent plus vite la maladie.
Pour améliorer l'hygiène il faut améliorer l'économie. Il ne va y avoir de changement qu'à partir de 1870.

Par ailleurs, les paysans, comme je l'ai signalé plus haut, rejettent souvent la médecine. Pour eux, les médecins vivent du malheur des gens.
Il y a une lenteur dans l'application des soins car les gens recourent d'abord au "sorcier". Celui-ci inspire confiance et coûte moins cher. Quand on se décide enfin à recourir au médecin, il est trop tard et le malade meurt souvent.
C'est le triomphe du sorcier car bien souvent, le médecin ne sait finalement rien faire de plus que lui.
Heureusement les malades étaient moins exigeants à l'époque. Les moyens de guérison étaient limités et les accidents étaient admissibles (ce qui est bien différent de la tendance actuelle qui est d'intenter des procès pour erreurs médicales).
Le malade ne doute pas de sa fragilité et la mort ne l'étonne pas, ce qui ne veut pas dire qu'il n'en a pas peur. D'ailleurs la mort vient aussi des accidents fréquents, des conséquences de bagarres, de mauvais traitements... Elle est donc très présente. Le médecin est là pour adoucir la souffrance, assister moralement, sauver ce qui peut l'être. On n'attend pas(encore) de lui des miracles.

3. Le home Sainte Elizabeth de Waimes

En milieu rural, à côté du travail du médecin, il se crée dans les gros bourgs des institutions de soins, souvent grâce à la charité individuelle. C'est par eux que les progrès scientifiques vont arriver dans les campagnes.

Marie et Elizabeth Lamby , deux femmes célibataires et propriétaires d'un bâtiment à Waimes avaient exprimé le voeu de léguer celui-ci à une oeuvre de bienfaisance. Elles firent part de leur intention au curé de Waimes (d'abord Henri Robert, mort en 1921 ,puis François Toussaint).
A leur mort(Marie en 1925 et sa sur en 1932),"les oeuvres d'action catholique dans le doyenné de Malmedy", dont le curé Toussaint était le fondateur, recueillit les legs des deux soeurs.

L'objectif était de créer un centre hospitalier. Ce sont les soeurs de Saint Augustin de Cologne qui acceptèrent de prendre le home en charge. Elles arrivèrent à Waimes dès 1934.
Une nouvelle aile fut alors construite. Elle abritait une chapelle et une école gardienne.
Durant la période nazie, l'école fut supprimée et remplacée par une colonie de vacances pour des enfants de Cologne. Cette colonie quitta Waimes en septembre 1944, à la veille de la libération.

Dès la fin de la bataille des Ardennes, le home accueille des malades de toutes catégories et se transforme en clinique. C'est le docteur Toussaint qui y exerce.
Une salle d'opération fut installée et on acheta du matériel de chirurgie et de radiographie.
Le personnel se composait de six religieuses.
De nombreux malades de Waimes y furent hospitalisés.

En 1958, le Ministère de la Santé et de la Famille supprima la clinique car un nouvel hôpital allait voir le jour à Malmedy, ville toute proche. Le home fut alors transformé en maternité moderne. Il reçut sa bénédiction en 1959 et acquit le nom de Sainte Elizabeth.

La maternité ferma ses portes en avril 1975 à cause du coût de plus en plus élevé des investissements en matière médicale.
En 1986, le home fut repris par le C.P.A.S.. Aujourd'hui, il se consacre essentiellement à l'accueil de personnes du troisième âge.

4. Conclusion

Les hôpitaux sont des structures essentielles dans nos sociétés.
Tout est aujourd'hui fait pour que l'ensemble de la population ait droit aux soins nécessaires. Mais les progrès supposent l'utilisation d'un matériel sophistiqué, cher, lourd à acheter et à amortir. Ce qui amène des institutions plus modestes à fermer leurs portes, comme ce fut le cas du home sainte Elisabeth qui ne survécut qu'en changeant de public.

Pourtant, il ne faut cependant pas oublier les personnes qui sont, aujourd'hui encore, exclues du système de santé, soit qu'elles ne remplissent pas les conditions, soit qu'ellesq vivent dans des pays où la Sécurité Sociale ne peut être organisée de manière efficace.
Beaucoup de progrès ont déjà été fait à ce sujet mais je crois qu'il reste encore un long chemin à parcourir.

5. Bibliographie

- Docteur Germain Galérant, Médecine de campagne: De la révolution à la Belle Epoque, Librairie Plon, Paris, 1988, pp 29 à 84 et pp. 245 à 255.
- Jacques Léonard, La vie quotidienne du médecin de province au XIXème siècle, Hachette, 1977, pp. 13 à 18, pp. 35 à 46 et pp. 190 à 216.
- Vuadeninnas-Waimes 888-1988, Françoise Fagnoul et alii, A.S.B.L. 110ème Anniversaire de Waimes, Waimes, 1988, pp.173-174.
- Feuillet sur la journée porte ouverte du home Sainte Elizabeth, 1994.

retour