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Evolution de la loi du Talion à travers le temps

Page Web réalisée à partir du travail de Natacha Rausch

Introduction

Définition
TALION : vengeance qui consiste à faire subir à l'offenseur un dommage identique à celui qu'il a causé.
La loi du Talion est souvent symbolisée par "oeil pour oeil, dent pour dent"
(Encyclopédie Hachette 2001)

Le châtiment, qui sanctionne sans prévenir, s'appelle la vengeance. C'est une réponse quasi arithmétique que fait la société à celui qui enfreint sa loi primordiale. Cette réponse est aussi vieille que l'homme, elle s'appelle le Talion. Qui m'a fait mal doit avoir mal, qui m'a crevé un oeil doit devenir borgne; qui a tué doit mourir ! Il s'agit d'un sentiment, et particulièrement violent, non d'un principe. Le talion est de l'ordre de la nature et de l'instinct, il n'est pas de l'ordre de la Loi. La Loi, par définition, ne peut obéir aux même règles que la nature. Si le meurtre est dans la nature de l'homme, la Loi n'est pas faite pour imiter ou reproduire cette nature. Elle est faite pour la corriger. Or le Talion se borne à ratifier et à donner force de loi à un pur mouvement de nature. Nous avons tous connu ce mouvement, souvent pour notre honte, et nous connaissons sa puissance : il nous vient des forêts primitives.(Albert Camus)

1. Origine de la loi du Talion
La loi du Talion apparaît dans le Code d'Hammourabi (1730 av. JC), roi de Babylone. On le rencontre aussi dans la Grèce archaïque et à Rome. Petit à petit le Talion disparaît au profit de condamnations pécuniaires. Mais à la suite des invasions germaniques (Ve siècle de notre ère), profitant de la justice publique, la loi du Talion s'installe à nouveau. Un principe qui a donc (eu) longue vie.
Et malgré la cruauté de cette loi, elle constitue un progrès contre la loi primitive de la vengeance individuelle, puisqu'elle restreint celle-ci à la réciprocité.
Aujourd'hui la loi du Talion est synonyme de barbarie

Si la personne qui à crevé un il est borgne, va-t-on lui crever le seul il qui lui reste?
Elle n'a fait qu'éborgner, et le tribunal la condamnerait à devenir aveugle!

2. Le Judaïsme, le Christianisme et la loi du Talion

La législation biblique détaille ainsi la loi du Talion :
* Genèse 9,6. Si quelqu'un verse le sang de l'homme, par l'homme son sang sera versé; car Dieu a fait l'homme à son image
* Exode 21, 23-24. Mais s'il y a un accident, tu donneras vie pour vie, oeil pour oeil, dent pour dent, main pour main, pied pour pied,
* Lévitique 24, 18-19. Celui qui frappera un animal mortellement le remplacera : vie pour vie. Si quelqu'un blesse son prochain, il lui sera fait comme il a fait
* Nombres 35, 19. Le vengeur du sang fera mourir le meurtrier; quand il le rencontrera, il le tuera
* Deutéronome 19-21. Tu ne jetteras aucun regard de pitié : oeil pour oeil, dent pour dent, main pour main, pied pour pied.
Ces 5 livres de la Bible forment le Pentateuque (Xe/VIe av. JC)

Dans la société hébraïque, les livres de l'Exode et du Lévitique citent toutefois nombre de délits, tels l'idolâtrie ou l'adultère, passibles de la peine de mort. Et le christianisme accepte le principe de la punition légale comme "anticipation du juste jugement de Dieu".
Notons ici que le christianisme a une position ambiguë. il a :
- soit accepté la punition légale, comme anticipation du juste jugement de Dieu ("Le magistrat est serviteur de Dieu pour ton bien. Mais si tu fais le mal, crains; car ce n'est pas en vain qu'il porte l'épée, étant serviteur de Dieu pour exercer la vengeance et punir celui qui fait le mal" Ep. aux Romains, XIII, 4) ;
- soit constaté que la violence appelle la violence (" tous ceux qui prendront l'épée périront par l'épée " Mathieu, XXVI, 52), et ce malgré la clarté du premier des dix commandements : " Tu ne tueras point "
Le christianisme a donc hérité de la tradition juive la légitimité de la peine de mort et a trouvé celle-ci mise en pratique quotidiennement dans l'Empire romain, son 1er terrain d'expansion. Le souverain, perçu comme le représentant de Dieu sur terre dans le domaine temporel, jouit du pouvoir divin sur l'homme, celui de supprimer la vie.

3. L'islam et la loi du Talion
Le Coran insiste sur le respect de la vie d'autrui : "celui qui a tué un homme qui lui-même n'a pas tué, ou qui n'a pas commis de violence sur la terre, est considéré comme s'il avait tué tous les hommes et celui qui sauve un seul homme est considéré comme s'il avait sauvé tous les hommes" verset 5,32.
Cependant, ce respect n'est pas absolu. En cas d'homicide volontaire, le Coran donne aux ayants droit la possibilité de se venger sur le coupable en application de la loi du Talion. "Ne tuez pas l'homme que Dieu vous a interdit de tuer sinon pour une juste raison. Lorsqu'un homme est tué injustement, nous donnons à son proche parent le pouvoir de se venger.", verset 17,33.
La Sunnah de Mahomet, qui aurait dit : "Celui qui change sa religion, tuez-le" requiert la mise à mort de l'offenseur. Ce délit est imprescriptible et ne peut faire l'objet de grâce de la part des autorités. Seul le repentir peut éviter à l'apostat d'encourir la peine de mort. C'est en vertu de ce principe que l'imam Khoeyni (religieux et homme politique) a émis sa fameuse fatwa contre Salman Rushdie. (écrivain britannique d'origine indienne)

4. Du 18e au 21e siècle
18-19e siècle
Emmanuel Kant, philosophe allemand (1724-1804), parlera en faveur de la loi du Talion en énonçant que "la peine ne peut jamais être infligée uniquement comme moyen de restaurer le bien sous une autre forme, soit pour le criminel lui-même, soit pour la société civile, mais doit toujours être prononcé contre lui pour la seule raison qu'il a commis un crime"
Il rejoint ainsi, par l'autre bout, les explications les plus courante (il l'a bien mérité) ou les plus anciennes : l'égalité des peines n'est possible que par l'intérêt de mort prononcé par le juge d'après la stricte loi du Talion.
Dans les Etats qui pratiquent encore la peine de mort, l'un des arguments utilisés est la force de dissuasion de la peine capitale. Toutefois tous les criminologues sont d'accord sur ce point : il n'en est rien. On doit donc admettre que l'argument majeur reste bien la loi du Talion: celui qui a tué doit être tué, la Justice étant alors réellement porteuse du désir de vengeance de la famille ou de la population en général.

Aujourd'hui (fin mai 2001)
En réponse aux attentats du 11 septembre 2001, G. Bush est entré dans la répression . Voici ce qu'en dit Java dans le "journal virtuel décalé à gauche", l'Ornitho: il y pointe bien le réveil de la loi du Talion et la difficulté de refuser l'entrée dans ce mode de pensée, si anciennement ancré dans les esprits.
"Tous derrière Bush dans la répression et la lutte contre le terrorisme. Tel est le mot d'ordre. La France et ses acolytes occidentaux s'associent derrière l'extrémiste de droite Georges Bush. Lutter contre les forces du Mal, punir l'assassin, et de manière exemplaire. Tous ensemble, tous, tous, comme de bons petits soldats de la Nation. Derrière Bush, lui seul. Il a désormais les pleins pouvoirs. Seul. Avec tout le monde derrière, contre le Mal.

Lutter contre le mal, punir par l'exemple. Ce manichéisme exhumé du Moyen Age, est aujourd'hui rabâché à la sauce démocratique au nom de la Liberté. (...) Busch ne fait qu'appliquer à l'échelle planétaire la rhétorique très simpliste et absolument pas civilisée qui régit la loi du talion. oeil pour oeil, dent pour dent. Mais que les pays occidentaux se liguent aveuglément derrière la politique américaine dans la lutte du Bien contre le Mal, alors là

Pourtant, cette loi du talion est régulièrement dénoncée par le parlement européen, notamment en ce qui concerne la peine de mort aux Etats-Unis, et bien sûr le conflit israélo-palestinien. Nicole Fontaine, présidente du Parlement européen, déclarait le 19 mai 2001, après sa visite au Proche-Orient : « Dans un contexte aussi dramatique, nous nous devons de rappeler aux uns et aux autres que la pratique de la loi du talion ne peut mener qu'à la catastrophe. Toutefois, j'espère encore qu'Ariel Sharon et Yasser Arafat s'efforceront de réduire cette spirale infernale de la violence et de la haine qui risque d'embraser la région. » Le discours pourrait aujourd'hui s'appliquer à l'échelle planétaire, en portant les espérances sur l'attitude respective de Bush et des ceux qui lui ont « déclaré la guerre ».

Mais non. Car du jour au lendemain, du ''deux grandes jolies tours'' au ''plus rien du tout'', les valeurs défendues (avec timidité, soit), au nom de la Liberté et de la Démocratie sont complètement éludées et enterrées, pour soutenir un comportement complètement inverse; au nom de la Liberté et de la Démocratie : « Cette agression contre l'humanité a frappé au coeur d'une nation amie avec qui l'Union européenne partage le combat pour un monde meilleur. Mais cette terrible attaque terroriste est aussi dirigée contre nous tous, contre nos sociétés ouvertes, démocratiques, multiculturelles et tolérantes » (1). Et Prodi d'ajouter : « Au cours des années les plus sombres de l'Histoire, les Etats-Unis ont été proches de nous. Aujourd'hui, c'est à nous d'être proches des Etats-Unis ». On croit rêver. Les Etats-Unis, qu'on dénonçait jusqu'à lundi dernier comme un pays ne respectant pas les valeurs démocratiques en son propre sein devient aujourd'hui « une nation amie avec qui l'Union européenne partage le combat pour un monde meilleur ». Lutter contre le terrorisme est devenu le mot d'ordre. Lutter contre les forces du Mal, punir l'assassin et de manière exemplaire. Tous ensemble, derrière Bush, lui seul. Il a désormais les pleins pouvoirs.
Lutter contre le mal, punir par l'exemple. L'axe du Bien et du mal, le vieux manichéisme, est aujourd'hui remis à la sauce démocratique au nom de la liberté. Bush et son puritanisme extrémiste à l'échelle planétaire reprennent la rhétorique très simpliste et peu civilisée de la loi du Talion.
Pourtant cette loi du Talion a été souvent dénoncée par le Parlement Européen, notamment en ce qui concerne la peine de mort aux Etats-Unis, et bien sûr le conflit israélo-palestinien.
Nicole Fontaine, présidente du parlement européen, déclarait le 19 mai 2001, après sa visite au Proche-Orient : "Dans un contexte aussi dramatique, nous nous devons de rappeler aux uns et aux autres que la pratique de la loi du Talion ne peut mener qu'à la catastrophe".
On devrait espérer que dans les deux camps, celui du "Bien et celui du "Mal" cet appel serait entendu. "

Une fois de plus l'Europe a de grandes difficultés à se positionner, à réaffirmer qu'elle est le berceau des droits de l'Homme et qu'elle a, depuis longtemps , extirpé la loi du Talion de son appareil législatif.

5. Juridiquement parlant
Aujourd'hui le principe nous paraît barbare et bien éloigné de l'idée de justice, puisqu'il s'agit avant tout de vengeance, dans la stricte réciprocité soit, mais de vengeance bien réelle.
Nous vivons dans une société qui défend un certain nombre de principes : les sociétés démocratiques considèrent en effet qu'il est impossible de se faire justice soi-même, qu'une personne impliquée dans un problème peut difficilement être objective vis-à-vis de la situation qu'elle vit. On dit ainsi que nul ne peut-être à la fois "juge et parti".
Les sociétés démocratiques veulent aussi relever un défi et dépasser le rôle de punition et d'autoprotection d'un jugement (que la sanction soit l'amende, la détention, voire la peine de mort dans certains Etats). Comment punir les condamnés et comment les réintégrer à la société? Les peines alternatives, les programmes de réinsertion sont des réponses partielles, pas toujours des solutions.

Bibliographie

- Hachette encyclopédie 2001
- http://www.ifrance.com/clady/camus.html
- http://www.espace-citoyen.be/site_justice/version/intro/photosemaine9.htm
- http://acat.jeunes.free.fr/peine/religionpeine/islam.htm
- http://www.agapefrance.org/campus/lesoutils/lesoutils.htm
- http://www.espace-citoyen.be/site_justice/version/intro/photosemaine9.htm
- http://www.ornitho.org/ornitho/article44.html
- Raphaël Draï, Le Mythe de la loi du Talion, Éditions Anthropos, 1996

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