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L'évolution de l'émigration belge au Canada

 

Transposition pour le Web du travail d'Annick Meulders

Depuis toujours, le Canada est une terre d'émigration privilégiée par les Belges. Ceux-ci font d'ailleurs partie des immigrants les plus appréciés dans ce pays d'Outre-Atlantique. Tentons, dans les lignes qui suivront, de comprendre pourquoi.

Les premiers émigrants

Mission de Sainte-Marie
au Pays des Hurons,
Ontario, Canada

Illustration sur un site
aujourd'hui disparu www.saintemariemongthehurons.on.ca
Les premières traces d'immigration de ceux qui deviendront des Belges remontent au dix-septième siècle. A cette époque, et pendant plusieurs décennies, les seuls à arriver au Canada sont des religieux. Ceux-ci sont envoyés par leurs ordres afin d'évangéliser les populations natives américaines (les Amérindiens) autochtones. Leur nombre à l'époque est tellement élevé que Leuven devient un centre de formation pour les prêtres européens en partance pour l'Amérique du Nord. Si les missionnaires se rendent donc nombreux au Canada, ils sont pour le moment presque les seuls émigrants belges à partir. Sur place, ils sont chargés de l'accueil du petit nombre d'immigrants laïques qui les rejoignent. Ce n'est qu'à partir du dix-neuvième siècle que l'on voit arriver en plus grand nombre des agriculteurs, suivis par des mineurs de fond.

La fin du dix-neuvième siècle : le premier mouvement migratoire
Dès les années 1850, le Gouvernement canadien lance une campagne de propagande d'énorme importance afin d'attirer au Canada un grand flot d'immigrants. Chez nous, les efforts sont intensifs ; les Belges, qui connaissent le français, ont en outre la réputation d'être bons catholiques et travailleurs. Leur immigration est dès lors fortement encouragée (le Gouvernement canadien va jusqu'à proposer la concession gratuite de terrains aux futurs immigrés). Les personnes recherchées a priori sont des agriculteurs ayant les moyens d'investir au Canada. Néanmoins, à cette époque, nombreux sont les ouvriers qui partent tenter leur chance en espérant obtenir des revenus plus importants que ceux qu'ils continueraient à percevoir en restant en Belgique.

Les moyens de propagande employés sont diversifiés : tout d'abord, le moyen le plus utilisé est la distribution gratuite de brochures vantant, de façon excessive, la beauté du Canada et la facilité de vie sur place, en partant par exemple de slogans tels que "Le Canada, belles récoltes, climat salubre, faibles impôts, instruction gratuite". Les difficultés dues à une première arrivée ne sont pas entièrement occultées, mais selon les brochures, la volonté de bien travailler et d'être courageux est une garantie de réussite et d'épanouissement (dans les brochures sont également expliquées les catégories d'immigrants souhaités, interdits et à éviter).
Ensuite, des agents canadiens envoyés en Belgique organisent conférences, informations, apport de matériel pédagogique présentant le Canada,... afin de renseigner au mieux les Belges désireux de s'expatrier.
Un troisième moyen employé est de payer à des Belges déjà installés au Canada un voyage leur permettant de venir témoigner, en Belgique, de leur expérience sur place. Ces mêmes Belges écrivent en outre leur histoire dans des revues destinées à paraître chez nous.

Enfin, à plusieurs reprises, à la fin du dix-neuvième siècle et au début du vingtième siècle, le Canada participe à des expositions internationales en Belgique et y déploie, dans son pavillon, les ressources multiples de son territoire, ce qui permet aux Belges de faire connaissance avec ce pays de manière plus visuelle.

Illustration
Pavillon canadien lors de l'exposition internationale de Liège en 1905
Archives nationales du Canada, P1-76923

Une fois arrivés au Canada, les émigrants belges sont vite confrontés à une réalité souvent très différente de celle promue par les brochures et les témoignages (l'arrivée sur place est problématique et les premières années sont difficiles à vivre). Si l'émigration des agriculteurs se déroule assez bien, les terres canadiennes étant grandes et fertiles et leur propriété étant effectivement directement acquise par les émigrants les exploitant, les ouvriers perdent rapidement leurs illusions. En effet, leur réalité quotidienne est autrement plus dure que celle dont ils avaient entendu parler en Belgique : les salaires ne sont pas à la hauteur de leurs attentes, les conditions de travail sont parfois même pires qu'en Belgique,...

L'évolution au vingtième siècle : du début du vingtième siècle à nos jours
Pendant les années 1920 a lieu la deuxième vague migratoire. Jusqu'en 1930, année lors de laquelle le Gouvernement canadien décide de mettre un frein profond à l'immigration, beaucoup de Belges vont s'installer (surtout dans l'Ouest du pays), et sont très bien accueillis, la Belgique ayant eu à l'étranger, pendant la Première Guerre Mondiale, une image de martyre (en effet, les Allemands avaient violé sa neutralité en l'envahissant). A cette époque, le milieu de l'agriculture est encore celui qui remporte le plus de succès.

 Illustration
Journal de propagande à l'émigration
Archives du Canada C-121059
La troisième vague d'émigration belge vers le Canada existe depuis les années 1950.
Depuis cette époque, cependant, le profil du "candidat immigrant idéal" a fortement évolué. Tout d'abord, les nouveaux arrivants n'appartiennent plus au secteur primaire : jusqu'au début des années 1970, les émigrants belges viennent du secteur secondaire (ouvriers, ...), puis ensuite, de plus en plus, et toujours de nos jours, du secteur tertiaire.
Ensuite, la politique d'immigration a changé : la Belgique, comme tous les autres Etats dans son cas, a perdu son statut de "groupe ethnique privilégié". Désormais, le Gouvernement canadien privilégie plus un type de personnes : celles qui répondent à tel ou tel besoin professionnel sur son territoire (on peut toujours trouver sur le site du Gouvernement canadien ou du Gouvernement québécois une liste des professions désirées - telles les professions scientifiques).
Enfin, on remarque une forte augmentation d'émigration de Belges francophones par rapport à l'ensemble des émigrants belges vers le Canada. La plupart d'entre eux vont d'ailleurs s'établir au Québec, qui les accueille volontiers car ils ont besoin d'un certain nombre de personnes parlant français afin de peser plus dans la balance linguistique canadienne.

Aujourd'hui, il n'existe plus de campagnes de propagande telles qu'il y en avait au dix-neuvième siècle. Les critères d'admissions dans le pays sont beaucoup plus stricts, un dossier doit être constitué et l'autorisation d'avancer plus loin dans les démarches est accordée ou pas selon le nombre de critères que la personne candidate à l'immigration au Canada remplit ou ne remplit pas (des points sont attribués en fonction du niveau d'études, de l'âge, de la connaissance du français et de l'anglais,...). Néanmoins, pour toute personne souhaitant se renseigner quant aux possibilités d'émigrer, outre les informations disponibles via les organismes officiels tels que les ambassades, Internet offre une ressource incroyable de sites, qu'ils soient étatiques (par exemple des sites gouvernementaux présentant les conditions à remplir pour immigrer, une présentation du Canada, de ses provinces, de ses ressources,...) ou commerciaux ou privés (les sites parlant de tourisme peuvent aider à se représenter le Canada, il existe en outre de nombreux sites dans lesquels on peut trouver des témoignages de personnes immigrées qui partagent leur expérience de vie,...).

Quant à notre intégration...
Depuis le départ, comme je l'ai dit, les Belges ont été fort appréciés par les Canadiens. Leur intégration a d'ailleurs toujours été rapide et aisée (dès le début par exemple, des unions ont eu lieu entre Belges et Canadien/nes). La conséquence aujourd'hui est qu'on ne retrouve pas, au Canada, une forte identité belge qui se traduirait, comme cela existe pour d'autres nationalités, par des "communautés" (on parle par exemple de la communauté italienne, ou polonaise, ...). De nos jours, on remarque cependant du côté des immigrants belges néerlandophones une tendance à se revendiquer comme Flamands (ils apportent plus de soins au maintien d'une certaine identité culturelle flamande sur le territoire canadien). Cette tendance n'existe néanmoins ni chez les Bruxellois, ni chez les Wallons, qui ne voient pas comme nécessaire ou même souhaitable le maintien de leur culture au Canada.

Bibliographie

- JAUMAIN, Serge, "Les Belges au Canada :des immigrants très courtisés" in Les émigrants belges : réfugiés de guerre, émigrés économiques, réfugiés religieux et émigrés politiques ayant quitté nos régions du XVIème siècle à nos jours, sous la direction d'Anne MORELLI, Bruxelles, Editions Vie Ouvrière, 1998, pp 115-132.

- Le Soir, Opinions et débats, Belges et Canadiens si semblables et si différents, 15 janvier 2000

- www.chez.com/turtlegaf/liens.html , consulté le 8 avril 2002
- www.civilization.ca/hist/advertis/ads4-06f.html , consulté le 8 avril 2002
- www.vivreaquebec.com , consulté le 8 avril 2002
- www.immq.gouv.qc.ca/francais/ , consulté le 4 mai 2002

 

NB. . Pour ceux qui voudraient se découvrir de lointains parents dans d'autres régions du grand continent, nous leur conseillons la lecture de
Françoise Lempereur, Les Wallons d'Amérique du Nord - Etude principalement consacrée aux Wallons établis au Wisconsin, Collection Wallonie, Art et Histoire, éditions J.Duculot, Gembloux, 1976

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