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L'orphelinat Cavens à Malmedy
Dans quelle dynamique s'est créé et a évolué
l'ancien orphelinat de la maison Cavens à Malmedy (1830-1958) ?

Transposition pour le Web du travail de Pauline Henrard


I. Contexte historique

Après plus de 1000 ans d'indépendance, Malmedy fut rattaché à la France (le 1er octobre 1795), pour être ensuite cédé à la Prusse le 31 mai 1815. En effet, l'aventure napoléonienne avait tourné à la tragédie: en 1812, c'est la campagne de Russie et en 1813, la défaite de Leipzig. L'empire vacille, la France est envahie. Le 4 avril 1814, Napoléon abdique et Malmedy est rattaché à la Prusse.

Les conquêtes françaises avaient bouleversé les habitudes commerciales. Les marchandises livrées antérieurement ne sont pas payées, et les impositions de guerre, les réquisitions, les assignats ne faisaient qu'aggraver la situation malgré une période de prospérité de 1810-1813.

C'est dans cette atmosphère tendue qu'une rivalité naquit entre les tanneurs dont faisait partie Jean-Hubert CAVENS (fondateur de l'orphelinat) et les drapiers à Malmedy. L'attitude expansionniste des tanneurs ne déplaisait pas qu'aux drapiers. Dès 1795, les gens de la campagne se plaignaient également de cette classe aisée et insouciante des villes.

II. Le couple fondateur

Jean-Hubert CAVENS, mécène et philanthrope était donc un commerçant et industriel redoutable. Il était membre fortuné d'une des grandes familles patriciennes de l'époque, mais était également un personnage conscient de la pauvreté de pas mal de ses concitoyens. Il épousa sa cousine germaine Marie-Elisabeth-Thérèse CAVENS, en vertu d'une dispense de Rome et de Cologne pour double consanguinité aux 2ème et 3ème degrés.

Ce couple se voulut, eux qui n'avaient pas d'enfants, les parents des petits malheureux qui étaient orphelins. Conscients tous deux de la misère qui règnait au début du régime prussien, Mme CAVENS distribuait des repas quasi gratuitement pendant que lui occupait les ouvriers sans travail. Exemple, il fit aménager le parc de " Mon Bijou " et fit entretenir de nombreuses propriétés qu'il avait tout autour de Malmedy. C'était un grand propriétaire foncier. Il possédait également de nombreuses industries (tannerie, collerie,), des troupeaux de moutons, un élevage de veaux,

III. Création de l'orphelinat

C'est après un rêve commun qu'ils se racontèrent mutuellement où ils se voyaient promettre à une jeune mère mourante qu'ils prendraient soin de son enfant après sa mort que le couple se décida à fonder un orphelinat sur l'emplacement de la " Maison du Pater ", Place de Rome, appartenant au Bureau de bienfaisance de Malmedy. Il construisirent, garnirent et meublèrent l'orphelinat. Jean Hubert CAVENS ne vit pas l'achèvement de son uvre. Il mourut le 12 juin 1833 à Spa et l'inauguration eu lieu le 24 juin 1835.

IV. Gestion de l'établissement

L'acte de fondation a été rédigé le 29 août 1830 par le notaire PLESSIER.

L'orphelinat était administré par une commission administrative composée de 7 membres :
- Trois personnes étaient désignées par les huit plus proches parents des fondateurs,
- Du curé de la paroisse,
- Du chef de l'administration communal (le Bourgmestre),
- D'un commissaire des hospices civils,
- D'un membre du bureau de Bienfaisance (origine des Centres Publics d'Action Sociale).

Pour faire partie de cette commission, il fallait être élu à la majorité absolue. Il n'y avait pas de femme ni de mineur (minorité jusqu'à 21 ans). Cette commission était dirigée par l'administrateur en chef de la commune. Ses attributions étaient entre autres la discussion et la fixation du budget de l'établissement, l'admission des orphelins ou leur renvoi pour des raisons déterminées, La commission administrative demandait toujours l'avis de Mme Jean-Hubert CAVENS et cela jusqu'à sa mort le 17 septembre 1850.

En ce qui concerne l'administration journalière, elle était réalisée par le Bureau Gérant. Celui-ci était composé de trois membres choisis par et dans la commission administrative dont deux devaient être repris parmi les élus de la famille. C'était pour une durée d'un an et pouvait être renouvelable.

Un receveur-caissier était également choisi parmi les membres de la commission administrative. Son rôle était entre autre de tenir les comptes. Il devait les présenter chaque année à la commission. Il ne pouvait prendre aucune décision importante en ce qui concerne les finances sans en parler à la commission.

Cette organisation suivait dans les grandes lignes le " schéma " actuel d'une asbl.

V. L'objectif de l'orphelinat et les conditions d'admission

L'Objectif de cet orphelinat était : " élever des enfants des deux sexes dans la religion catholique et les rendre à la société lorsqu'ils auront reçu une bonne instruction religieuse et qu'ils seront capables de gagner leur vie par le travail,".

Ce sont des enfants orphelins dépourvus de moyens d'existence et nés de deux époux décédés, qui avaient leur domicile réel à Malmedy à l'époque de la mort des parents. En cas d'insuffisance d'orphelins de père et de mère, ils accueillaient des enfants ayant perdu seulement leur père ou leur mère, si le survivant était chargé d'une famille nombreuse et possédait peu de ressources, ou s'il vivait dans le besoin. Le choix pour l'admission était fait de préférence :
- Parmi les orphelins des parents des fondateurs,
- Parmi les orphelins d'ouvriers ou des domestiques ayant servi avec zèle et fidélité les fondateurs ou leurs représentants.

Certains enfants étaient exclus de l'établissement :
- Les enfants qui n'étaient pas catholiques,
- Les enfants naturels,
- Ceux qui ont été abandonnés par leurs parents,
- Ceux dont leurs pères ou mères avaient eu une inconduite notoire,
- Ceux dont le père ou la mère avait été condamné à une peine afflictive ou infamante ou à une peine correctionnelle pour vol,
- Les enfants qui avaient une quelconque infirmité.

L'enfant devait être âgé de six ans accomplis et ne pas avoir atteint l'âge d'onze ans. Tout orphelin quittait l'établissement lorsqu'il avait dix-huit ans ou avant cet âge si la commission administrative le jugeait capable de pourvoir à son existence.

VI. Evolution de l'orphelinat

Dans un premier temps, l'orphelinat ne put accueillir que des filles faute de moyen pour recevoir les deux sexes. Mais grâce au testament où Mme CAVENS fit une donation à l'orphelinat. Celui-ci put faire face aux frais occasionnés par les transformations qui s'imposaient pour permettre d'accueillir dans l'établissement des enfants des deux sexes. Ce qui fut réalisé en 1843. En 1847, il y avait environ 16 enfants.

C'est grâce également aux aides apportées par le Comte Louis CAVENS, petit-neveu du fondateur que l'orphelinat a pu survivre fin du XIXème siècle et début du XXème siècle.

L'orphelinat fonctionnait depuis juin 1835 et était tenu par les deux surs DANIEL, qui provenaient de Liège. A leurs pensions en 1864, ce sont les Filles de la Croix qui prirent le relais. Il y avait alors une vingtaine voire une trentaine d'enfants à l'orphelinat.

En Prusse, c'est Bismark, le chancelier de fer, qui était au pouvoir depuis 1862. Il voulait une Allemagne forte et unie sous l'égide de la Prusse. Il s'attaqua alors à l'Eglise catholique : le Kulturkampf (=le combat de la culture) commençait. Les Filles de la Croix n'ont pas été épargnées et vers le 30 mars 1877, elles quittèrent Malmedy. Ce n'est qu'en 1893, qu'elles ont pu revenir s'occuper des orphelins. Durant leur absence, c'est un personnel laïc qui prit le relais.

Après des démarches qui ont duré un demi-siècle, l'établissement est reconnu " personne civile " en avril 1886 ayant donc une existence juridique. La personnalité juridique (asbl) a été en sus expressément reconnue à l'établissement, en novembre 1923 en vertu de l'article 30 de la loi du 27 juin 1921, par des actes de l'administration belge, Malmedy ayant été rattachée à la Belgique par le Traité de Versailles (28 juin 1919).

Le 31 août 1958, l'orphelinat ferma, faute d'un nombre suffisant d'orphelins qui justifierait le maintien de l'institution.

VII. Utilisation actuelle du bâtiment

Après sa fermeture en 1958, il y eu entre autres les frères maristes qui y séjournèrent. C'est en 1968 que Malmedy racheta le bâtiment grâce aux subsides du Ministère de la Culture Française. L'idée de faire un centre culturel avec musée est émise en 1971. Ainsi fut fait et le bâtiment fut " divisé " en cinq sections :
- Le musée national du papier,
- Le carnaval de Malmedy,
- La bibliothèque et archives,
- La salle polyvalente qui accueille différentes expositions culturelles,
- L'atelier de fabrication de papier à la cuve.

La bibliothèque a actuellement déménagé entre autres parce que l'étage qui lui était destiné était devenu trop petit.

VIII. L'accueil d'enfants sans famille aujourd'hui

En ce qui concerne l'accueil d'enfant orphelin, actuellement c'est principalement le rôle de l'Etat ou d'organismes publics : ce sont les CPAS qui gèrent le patrimoine de l'enfant (s'il en possède un), qui financent l'éducation, qui entretiennent l'enfant,...

Contrairement à l'orphelinat que j'ai décrit dans ce travail, il n'y a pas de sélection de l'enfant : tout enfant est pris en charge. Différentes institutions peuvent accueillir ces enfants tels que les centres d'accueil, Mais la prise en charge dans de tels services est toujours pour une durée déterminée car la politique dictée par le décret de 1991 sur l'Aide à la Jeunesse (art.40 à 42) met l'accent sur l'importance pour l'enfant abandonné d'avoir un cadre familial. Ce décret veut éviter qu'il soit différent des autres, en marge. On va donc rechercher rapidement une famille d'accueil voire d'adoption. Remarquons que l'accompagnement de l'enfant abandonné et la procédure d'admission dans un orphelinat étaient tout à fait différents que ceux utilisés actuellement en Belgique. La prise en charge de l'enfant a suivi l'évolution des mentalités de notre société.

Bibliographie
- H. CUNIBERT, Centenaire de la Maison d'Orphelins fondée par J.-H. Cavens à Malmedy 1830-1930, Liège, 1930.
- Vv. Jean Hubert CAVENS, Statuts de l'orphelinat à Malmédy, Malmedy, le 25 Mai 1834.
- Raymond JACOB, Généalogies de nos Vieilles Familles Malmédiennes, in Revue Folklore : Stavelot- Malmedy- Saint-Vith, Malmedy Folklore, asbl, 1984.
- Article rédigé par A. LEDUR dans la brochure réalisée à l'occasion de la manifestation en remerciement à la Communauté religieuse des " Filles de la Croix ", Les Filles de la Croix à Malmedy, 1992.
- Maurice LANG, Famille et Terroir Malmedy : Généalogie de la Famille Cavens, 1964.
- Le Pays de Malmedy, Porte ouverte à la Maison Cavens à Malmedy historique et projet de Musée du Papier, in Le Jour 6, vendredi 17 septembre 1976.
- Robert CHRISTOPHE, Aperçu historique de Malmedy, http://www.ulg.ac.be/malmarhi/Hist01.htm, consulté le 14 mai 2002.
- Législation du CPAS, Cours de Mr MICHEL, ESAS 2001-2002.
- Organisation et travail social, Cours de Mr ISTASSE, ESAS 2001-2002.

 


 

 

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