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L'enseignement primaire belge au 19es,
vu à travers le cas de l'école de Bellevaux

Page réalisée à partir du travail de Françoise Thanen

I. Généralités
Dès les débuts de l'humanité, l'enseignement en tant qu'apprentissage, était déjà présent. Les sages et les "vieux" de la communauté assuraient la continuité et la prolongation des savoirs. L'éducation a continué son chemin et évolué grâce à des personnages célèbres, tels que Charlemagne et Jules FERRY.

Il fallut attendre la Révolution Française pour voir apparaître des essais de définitions de l'instruction publique "comme moyen et fin de l'idéal de l'égalité dans la liberté". Avant celle-ci, seuls les nobles, les clercs ou les personnes fortunées avaient accès aux livres et aux savoirs.
Il s'agissait donc de démocratiser l'enseignement, d'en mettre dorénavant ses bienfaits au service de la majorité. Le but étant l'égalité sociale.
Un des grands penseurs de la révolution, Condorcet, lança une réflexion sur l'enseignement qui déboucha, sur des déclarations de principe sur la mise en place d'un enseignement gratuit, obligatoire et commun à tous les citoyens.
Mais il fallut encore 40 ans pour que la loi GUIZOT du 28 juin 1833 instaure la liberté de l'enseignement primaire et oblige chaque commune à disposer d'une école primaire pour garçons.
La loi DURUY du 10 avril 1867 autorisa les communes à établir des impositions spéciales pour assurer l'accès aux élèves plus défavorisés.

En Belgique, l'obligation scolaire mit beaucoup de temps à s'imposer, d'abord dans les lois puis dans les faits. C'est seulement en 1914 que l'école devint obligatoire de 6 à 14 ans révlus.
L'éducation n'a pris place dans les droits de l'homme que tardivement. La déclaration de 1948 proclame : "toute personne a droit à l'éducation."
En 1959, la déclaration des droits de l'enfant proclame: "L'enfant a droit à une éducation qui doit être gratuite et obligatoire au moins aux niveaux élémentaires. Il doit bénéficier d'une éducation qui contribue à sa culture générale et lui permettre, dans des conditions d'égalité de chances, de développer ses facultés, son jugement personnel et son sens des responsabilités morales et sociales, et de devenir un membre utile de la société."

II. Quelles inégalités ?

Il y a plusieurs types d'inégalités possibles, remarquées à différentes époques, que l'enseignement et la société ont tenté et tentent toujours de résoudre.

A) En fonction du sexe de l'enfant
Au début de la scolarisation, aux environ de 1850, et jusqu'il y a peu, les rôles hommes - femmes étaient très codifiés. La femme restait à la maison et s'occupait du ménage tandis que l'homme travaillait en extérieur. Ce dernier avait donc davantage besoin de qualifications. L'école apparaît comme un luxe inutile quant il en va du sort de la fille. (De plus cf. supra loi GUIZOT).


B) En fonction de l'appartenance familiale
Bien que l'enseignement soit proclamé gratuit, l'achat de livres ou encore les différentes exigences implicites de l'école (vêtements, objets pour faire comme les autres...) impliquent que certaines familles se retrouvent bloquées par le facteur financier. Une enquête très récente de La Ligue des Familles montrait que 30% des parents éprouvaient des diffucltés à assurer les dépenses scolaires.
D'autre part, des familles économiquement défavorisées, il n'y a pas si longtemps d'ici, avaient besoin de leur(s) enfant(s) pour les aider dans le travail quotidien. Dès lors le temps et l'attention consacrés aux études étaient réduits.(cf. infra point III. école de Bellevaux).
Les chances de réussites sont également plus élevées lorsque l'enfant est issu d'une famille culturellement favorisée. Pour la simple raison que l'école était et est encore parfois formée sur le mode de fonctionnement des classes sociales supérieures. Les enfants issus de ces classes ont déjà acquis, dans les premières années de leur vie, les codes nécessaires à leur futur apprentissage, qu'ils soient de comportement ou de langage.
On pourrait ajouter le fait que des parents ne disposant pas d'instruction ne pourront que difficilement aider leur enfant.
=> Au cours des six premières années de sa vie, l'enfant est très dépendant de sa famille, donc la situation sociale, économique et culturelle de celle-ci influence considérablement son développement. Il aura plus de chance de réussir ses primaires et alors éventuellement d'entrer dans une école supérieure. C'est la fonction de l'école comme mode de reproduction sociale, dénoncé par Pierre Bourdieu.

C) En fonction d'une appartenance "raciale" ou ethnique :
L'école produit son enseignement non pas de manière universelle mais avec les codes et les usages propre à la région dans laquelle elle est ancrée. L'éducation remplit notamment la fonction de transmission du patrimoine culturel du pays et de la région. Une personne venant d'un autre pays (enfants des travailleurs immigrants italiens de 1946, par ex.) nécessitera donc un certain temps d'adaptation, qui pourra être fatal à sa réussite scolaire dans certains cas.
En Amérique par exemple, il fallut attendre plusieurs années et de nombreuses "révoltes" avant que les noirs puissent entrer dans une école de blancs. Et même s'ils étaient tolérés, des réactions de haine ou de peur pouvaient se faire sentir dans les relations entre les élèves. Parfois, les réactions des enseignants étaient aussi sans pitié.
Or la réussite scolaire dépend également de l'intégration et des bonnes relations entretenues avec les autres membres de l'école

D) D'autre inégalités pourraient aussi être présentées mais celles-ci sont quasi insurmontables.
Comme le fait par exemple pour un enfant d'être atteint de telle ou telle maladie et de ne pouvoir suivre les cours normalement.

III. Illustration : l'école communale de Bellevaux fin XIXème

Introduction
Le village de Bellevaux se situe dans l'entité de Malmédy. Si cette région a fait partie de la Principauté de Liège dans l'Ancien Régime, au Traité de Vienne en 1815, elle fut exclue du futur Royaume des Pays-Bas, pour être jointe à la Prusse. Elle rentrera dans la province de Liège seulement après la guerre de 1914-1918.
La période évoquée dans ce travail se situe donc non dans le cadre belge mais prussien puis allemand.

A )L'obligation scolaire
Jusqu'il y a trois siècles, il n'existait pas encore d'enseignement pour les enfants des petits villages. Seuls les parents plus fortunés pouvaient envoyer leur(s) enfant(s) dans des couvents ou dans des écoles plus lointaines.
Vers 1706, les premiers cours furent donnés par un vicaire.
C'est en 1821 que le premier enseignant laïc apparut. Il fallut attendre 1825 pour que l'enseignement devienne obligatoire dans notre région pour les enfants de 8 à 14 ans.
Dès 1846, nous retrouvons dans cette école des instituteurs formés.

B) Inégalités économiques
Auparavant les enseignants étaient payés en nature, c'est-à-dire en seigle ou en avoine, mais dès l'enseignement obligatoire les parents solvables payaient la prestation de l'instituteur, son logement (dans l'école) ainsi que le chauffage de l'école.
Il s'agissait de payer un Thaler et 10 Silbergraschen par enfant, cette somme était calculée suivant les avoirs des familles. (Remarquons que l'enseignement fourni par les vicaires, antérieurement à l'enseignement laïc, était payé par les citoyens de la paroisse.)
Pour l'apprentissage de la lecture, les parents devaient payer 9 sous de Liège, pour la lecture et l'écriture il fallait alors payer 12,5 sous. Les personnes aisées avaient donc plus de possibilités. Cependant pour l'individus pauvre mais doué, il y avait des aides possibles, notamment au niveau de la Commune qui prenait sa scolarité en charge. (cfr le système actuel des bourses).
Une certaine honte, provoquée par l'incapacité de pouvoir se payer les livres ou par l'aspect extérieur de leur(s) enfant(s), amenait des parents à ne pas mettre leur(s) enfant(s) à l'école.
Pour permettre une fréquentation plus assidue des cours par les élèves, le professeur décida de payer les crayons et les livres utiles et nécessaires afin d'assurer un apprentissage correct.
La pauvreté et l'inégalité étaient combattues par la solidarité des enseignants et des familles. En effet, au début du 20esiècle, l'école fournissait gratuitement la soupe du repas de midi, certains élèves prenaient également le double de tartines, afin de pouvoir les donner aux autres plus défavorisés.

C) Les valeurs de l'époque et de la famille
C'est essentiellement cet aspect qui détermine la fréquentation de l'école ou non par les élèves:
Vers 1888, pratiquement tous les habitants du village étaient fermiers. Les conditions de vie étaient aussi relativement précaires et certaines familles avaient besoin de l'aide de leur(s) enfant(s) dans le travail. Certains enfants n'allaient donc pas tous les jours à l'école, mais les enseignants, au courant de ces problèmes, fermaient bien souvent les yeux.
En outre, ces enfants, utiles à leurs parents, devaient bien souvent effectuer leur travail "domestique" prioritairement à leurs devoirs scolaires, ces derniers étant considérés comme superflus puisque l'enfants était destiné à reprendre la ferme.
Pour certains parents étudier ne servait à rien; ce qu'il fallait, c'était être courageux et travailleur.

IV. Actuellement

1) Dans nos pays
Les différentes discriminations tendent à disparaître, petit à petit à force de luttes et de revendications.
Cependant une différence persiste quant au choix d'étude (débordement du cadre de l'enseignement primaire). En effet on constate que les filles sont attirées vers tels ou tels métiers (exemple: études d'assistantes sociales), mais peut-on parler à ce stade d'inégalités?
En Belgique encore, il y a des inégalités également, quant au choix dde filières dans le secondaire, d'études supérieures ou universitaires. Si les filles sont devenues majoritaires à l'université, elles sont très inégalement réparties selon les options et elles sont très minoritaires dans les postes d'enseignants de haut niveau ou de chercheuses., comme le montre un étude récente (voir article du Le Vif l'Express du 7 mars 2003)
=> Tant que l'école aura pour but d'opérer une sélection en constituant une élite les inégalités persisteront.

2) Exemple concret, la situation au Congo en 1998
Il faut remarquer que le droit à l'éducation ne fut clairement exprimé au plan international que quelques temps après la seconde guerre mondiale, suite à la déclaration universelle des droits de l'homme en 1948 , à la déclaration des droits de l'enfant en 1959 et suite aux pactes relatifs aux droits économiques, sociaux et culturels de 1966.
On sait qu'aujourd'hui encore dans de nombreux pays du Sud, la scolarisation des filles est un réel problème même si l'on sait que le développement d'un pays passe précisément par l'éducation des filles.

Situation
Il y là non seulement inégalités entre les élèves d'une même école mais également entre les enfants de nos régions et de ce pays.
Les écoles sont normalement gratuites et les rémunérations des salaires pris en charge par l'Etat. Cependant la situation économique et politique est précaire et l'Etat ne suffit plus pour subvenir à ce besoin. Les classes sont surpeuplées, le matériel scolaire quasi inexistant. Les enseignants, quand ils sont payés, n'ont plus qu'un maigre salaire. Les parents doivent alors garantir les revenus des instituteurs. Il est évident dès lors que l'éthique professionnelle est mise en péril; cela va même jusqu'à payer pour passer un examen ou pour effacer un échec.
Si le professeur ne reçoit pas assez d'argent, les cours sont suspendus. Une conséquence grave est que même si le temps de scolarité n'est pas respecté, les diplômes seront remis par peur des colères et représailles.
C'est une situation très pénalisante pour tous les partenaires : pour les jeunes qui ne recoivent pas l'éducation à laquelle ils ont droit, pour les enseignants qui ne peuvent exercer leur métier dans la dignité et, enfin, pour les étudiants qui viennent étudier chez nous, car on généralise le jugement péjoratif porté sur leur cursus et souvent ils ont de grandes difficultés à faire reconnaître la validité de leur diplôme d'humanités.

Bibliographie

Illustrations
Rang en 1ère primaire à l'Ecole abbatiale de la Paix Notre-Dame, 1956 (document personnel)
Ecole communale de Bellevaux en 1888 (dans R.Piront)
"Cour de récréation" au Congo, photo de Job Inisan (dans DBA, les salésiens au Congo depuis 37 ans, nov.déc.1996, p.22)

Brochure
- R.PIRONT,100 ans,1888 - 1988, Ecole Communale Bellevaux, RETROSPECTIVE, 1989.
Témoignage
- Témoignage de Etwige ZANDER, habitante de Bellevaux et fille de Mr ZANDER, ancien enseignant de l'école de 1898 à 1920.
Livre
- G.MIALARET, Le droit de l'enfant à l'éducation, 1979, Ed. UNESCO.
Articles de magazines
- A.PROST, l'enseignement s'est-il démocratisé ?, in les collections de l'histoire n°6, octobre 99, diffusion Larousse, pp.76-78.
- J-P.KOKANGO, l'école pour tous, une illusion, in le Ligueur, n° 23, 10 juin 1998, p. 19.
Internet
- http://www.ufmt.br/revista/arquivo/rev11/leducation_pour_demain_.htlm.

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